Bien avant cette initiative, il y avait toute une série de codes fiscaux en Haïti. Toutefois, c’était des compilations, a expliqué d’entrée de jeu l’expert en fiscalité Lucknaire Duval. Il était difficile de se repérer au travers des textes de loi. Parmi les travaux de compilation louables, on retient celui du professeur Joseph Paillant dans les années 90. Aussi, ce code facilitera la présentation mais également une meilleure définition des textes de loi fiscaux. De l’avis du spécialiste, « le code intégré facilitera la rédaction des lois fiscales et des lois relatives à l’impôt ».
Alors qu’on est en 2024, nous avons encore des lois fiscales datant de 1918, qui n’ont connu aucune modification, s’indigne monsieur Privert lors de sa présentation. « Les derniers textes relatifs aux impôts et aux taxes datent de 2002, 2003. Certains textes ont plus de 40 ans d’existence et sont toujours en vigueur, alors que la société ne cesse d’évoluer. Elles deviennent ainsi obsolètes », a illustré M. Privert.
« De plus, depuis plus de quinze ans, nous avons pris la mauvaise habitude de modifier les lois fiscales par de simples lois de finances. Ces décisions étatiques mettent le citoyen dans l’impossibilité de se référer à des articles justifiant ses actes. D’où la nécessité d’un nouveau code fiscal, qui prend en compte toutes les évolutions et les avancées technologiques actuelles», a justifié l’ancien d’État.
Revoir le Code fiscal est de première nécessité certes, mais la démarche est aussi bien importante. « Le code sera publié sous forme de décret alors qu’il devrait être l’affaire du Parlement », a rappelé l’ancien président provisoire du pays. Pour lui, c’est une violation des prérogatives du Parlement, car la Constitution ne reconnait à l’exécutif aucune prérogative législative.
Par ailleurs, doter le pays d’un code fiscal n’est pas seulement l’affaire du Ministère de l’Économie et des Finances. D’après l’ancien directeur général de la DGI, « l’article 7 de la Constitution stipule que des décisions engageant la nation doivent faire l’objet de consultation et de concertation de toute la population ». Voilà pourquoi la démarche de munir le pays d’un nouveau code fiscal ne peut se faire entre les murs du MEF.
Établir un code fiscal ne résoudra pas automatiquement tous les problèmes liés à la fiscalité du pays. En effet, certains articles et lois demandent un ensemble de dispositions que les autorités n’ont pas. Face à la modernisation des services, « la Direction générale des impôts n’a pas encore établi de procédure propre pour informatiser le système de l’administration fiscale », a déclaré pour sa part Monsieur Duval. Le code veut également prélever des impôts sur les propriétés non bâties. Cependant sans équipements et matériel comment le gouvernement va-t-il surveiller ces propriétés? s’est interrogé l’expert en fiscalité. A cela s’ajoute non seulement le manque de formation du personnel et des cadres, mais aussi le manque d’information de la population.
Aussi, la question qui revient sur toutes les lèvres est : sommes-nous réellement prêts à appliquer un tel code fiscal en Haïti ?
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